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jeudi 13 mars 2025

UN LOOSER À MATIGNON ?



Se souvient-on encore des déclarations de François Bayrou, lequel estimait le 27 août dernier, à la télévision, que "tout le monde avait perdu" après le deuxième tour des Législatives ? La formule pouvait certes passer pour "un bon mot" voire une "boutade". N'empêche qu'elle déniait le succès du NFP, donc la volonté des électeurs et électrices, dont Emmanuel Macron n'entendait pas tenir compte, résolu qu'il était à garder la main en essayant des gouvernements de Droite et du Centre.

Le maire de Pau, ce "perdant auto-proclamé"  est aujourd'hui premier ministre. Il profite visiblement, au moins dans les sondages et comme le chef de l'état, de la conjoncture internationale, pourtant catastrophique. On parle à ce propos d'un "effet drapeau" : réflexe patriotique censé unir la nation en cas de menace existencielle grave. Agressés par les États-Unis de Trump et défiés par la Russie de Vladimir Poutine (apparemment d'accord sur l'essentiel) la France et ses partenaires européens se doivent en effet de faire front. 

On espère qu'ils le feront avec intelligence, le but devant être, pensons-nous, de devenir plus forts pour dissuader un éventuel adversaire... et non de préparer une guerre, puis de la faire ! Aux motifs d'inquiétude que peuvent nous inspirer certaines déclarations de nos gouvernants s'ajoute en tout cas un grand agacement, quand la guerre en Ukraine est franchement instrumentalisée pour faire oublier les polémiques fâcheuses du moment, par exemple : sur le mauvais comportement reproché à notre chef de gouvernement avant qu'il n'assume cette haute fonction, sur des dossiers locaux particulièrement sensibles....

Les accents guerriers du discours élyséen ne doivent pas, par ailleurs, masquer la faiblesse politique réelle de l'Exécutif français actuel, que l'opinion ne soutient que très mollement, et uniquement parce qu'il assume ostensiblement une posture héritée du gaullo-mitterandisme traditionnel (une ligne écornée jadis par un grand ami d'Emmanuel Macron : le ci-devant Président Sarkozy, lequel avait décidé de rejoindre l'OTAN et les armées intégrées sous commandement des États-Unis, et jugé publiquement que refuser l'alignement sur l'Amérique, c'était faire la "chochotte" - sic). Encore l'UE, qui semble se décider aujourd'hui à investir davantage dans les dépenses militaires, le fait-elle tout justement à hauteur de l'effort exigé par Donald Trump : s'agit-il d'une coïncidence, et sera-ce au profit des exportations états-uniennes ? On serait bien loin, dans cette éventualité, d'atteindre à la souveraineté et à l'indépendance stratégique recherchées par la France ; et "Néron" comme son bouffon sous "kétamine" (dixit le sénateur Malhuret, dont on connaissait de longue date le talent oratoire et la propension à l'humour féroce, mais dont la large diffusion outre atlantique de ses propos hostiles au virage pris par la nouvelle administration américaine a surpris) pourraient dédaigner les critiques et poursuivre sur le front commercial leur offensive douanière, très inamicale à l'égard de leurs "alliés". 

Ce qui déboucherait pour notre pays sur une vraie défaite, politique et morale. Et marquerait un revers sérieux pour M Bayrou, d'ors et déjà marginalisé, car inaudible, sur le plan diplomatique (domaine réservé du Président) comme aux niveaux stratégique et économique (compétences transférées à l'UE) : les rétorsions européennes à la guerre tarifaire déclenchée par la Maison-Blanche seront en effet éventuellement annoncées par Ursula Von der Leyen, le locataire de Matignon disposant visiblement de moins de cartes dans son jeu que le premier ministre du Canada ou même que "le gouverneur" (premier ministre) de l'Ontario et se voyant en partie dessaisi de son pouvoir d'arbitrage par "son ami" Emmanuel Macron ! A moins que ce ne soit la modestie naturelle du "vicomte de Béarn"  qui l'empêche de s'exprimer haut et fort ? Toujours est-il qu'il s'est contenté de constater que M Trump rendait le monde "plus dangereux" (sans blague ?) mais sans rendre public aucun projet de riposte sérieux. Aussi les commentateurs ne le décrivent-ils déjà plus que comme un homme voulant "durer à son poste"... sans plus d'ambition.

ajouté le 2 août

SIX MOIS D'INTERMÈDE BÉARNAIS

Récidive de F Bayrou, lequel évoque dans ses commentaires publics une forme de "soumission" après l'accord intervenu entre les États-Unis et l'Europe, sur la base d'une taxation des exportations de l'UE à hauteur de 15 % mais n'envisage pas pour autant que la France remette en cause l'accord. Le Président non plus, qui affirme seulement qu'on "n'en restera pas là", c'est-à-dire que, lors des négociations futures, il faudra, paraît-il, que l'Europe soit "davantage crainte" (sic). Une incantation, sans plus !

Ce sont donc peut-être les autorités allemandes, encore que la punition qui est infligée à leurs industriels par l'administration Trump est inférieure à leurs pires craintes, qui assumeront de torpiller l'accord. Car au fond, pour Paris, le traitement de la question incombe davantage à Rome et Berlin, les deux capitales des nations de l'UE exportant en masse des produits manufacturés vers l'Amérique. Or, pour ces deux pays, le nouvel arrangement est a priori meilleur que la situation antérieure (Volkswagen et Stellantis sont-ils pour autant satisfaits ? Pas sûr).  

On croit comprendre que la France, de plus en plus désindustrialisée, mais qui aurait sécurisé ses niches (l'aéronautique, en tout cas : car pour le reste, y compris le vin et le luxe, c'est beaucoup moins évident) ne se battra pas pour sauver les autres fleurons qui lui restent (on a vu récemment la mollesse des autorités sur la question de l'acier, alors que la gauche commence à penser à de possibles nationalisationsn devant la mauvaise gestion de l'appareil de production et des emplois par Mittal). 

Bref, toute la classe politique hexagonale s'agite et dénonce une "capitulation" de l'UE (il s'agit aussi, pensons-nous, d'une forme de de racket, car les Européens ont promis de faire de nombreuses emplettes aux states : armements, mais aussi hydrocarbures) mais la Droite au pouvoir ne semble pas vouloir aller au delà de ces fortes déclarations ; la France de Macron et consorts demeure très effrayée par la perspective d'une guerre commerciale - laquelle pourrait, il est vrai, affecter les revenus des actionnaires.  

Quand "laissez-faire" rime avec renoncement, voire déclin... 

et que le chef (nominal) de l'Exécutif semble essentiellement occupé à préparer sa sortie - préparant délibérément une crise politique par l'annonce de mesures d'austérité antisociales et provocatrices, sans doute destinées à lui tailler a posteriori le costume de "grand réformateur néo-libéral empêché par les populismes". Triste trajectoire ; mais le maire de Pau, fort de la bienveillance du RN à son égard,  aura de toute façon duré plus longtemps que son prédécesseur Savoyard, en place durant, seulement, un tout petit trimestre.

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